A l’heure où les restrictions s’allègent timidement, à l’heure où le confinement semble être derrière nous, l’envie de retourner plonger se fait de plus en plus pressante parmi les plongeurs. Y compris parmi ceux qui ont eu le malheur d’être infecté par le virus de la Covid-19.
La plongée est un sport à risque qui exige d’être en parfaite condition physique (notamment au niveau respiratoire et cardiaque) pour limiter au maximum les risques d’accident. Est-ce alors bien raisonnable de reprendre la plongée après avoir contracté la Covid-19 ? Alors que même les scientifiques ignorent les potentielles séquelles cardiaques et respiratoires à long terme ?
Ces questions, les experts hyperbares se les sont posés dès les débuts de la pandémie, et leurs recommandations à destination des plongeurs ayant contracté le virus de la Covid-19 ont été publiées au printemps 2020. Tous sont unanimes : on en sait encore peu sur ce nouveau virus et sur les séquelles à long terme qu’il peut provoquer. On en sait donc encore peu sur les conséquences d’une infection à la Covid-19 sur la pratique de la plongée scaphandre loisir, et ces recommandations sont amenées à évoluer avec le temps.
Elles ont d’ailleurs été mises à jour récemment, et DAN a publié l’avis médical actualisé dans son magazine en ligne AlertDiver en avril 2021. Pour ceux qui l’ignorent, DAN signifie Divers Alert Network. C’est une fondation pour la recherche et la sécurité en plongée dont la mission est d’offrir à ses adhérents un réseau complet d’assistance pour la plongée.
En plus de s’investir dans la recherche médicale hyperbare, DAN propose différentes options d’assurance spécifique à la plongée. Les assurances voyage ou assurances personnelles couvrent rarement les accidents de plongée, activité souvent considérée « à risque » par les assureurs. Lorsque l’on sait qu’un rapatriement sanitaire ou un traitement en caisson hyperbare coûte plusieurs milliers d’euros, on se dit qu’une assurance plongée qui coûte moins de 100€ par an peut valoir le coup…
L’assurance plongée proposée par DAN prend en charge les traitements médicaux et hyperbares non couverts par l’assurance-maladie et propose une assistance par des médecins hyperbares 24h/24, 7j/7, dans notre langue, et peu importe où nous soyons dans le monde.
En tant qu’instructeurs de plongée, nous conseillons toujours à nos élèves de s’assurer contre les accidents de plongée. Même en prenant toutes les précautions, le risque 0 n’existe pas. Et c’est encore plus vrai pour ceux et celles qui plongeront après avoir contracté la Covid-19. Pour plus d’informations à ce sujet, consultez notre article consacré à l’assurance plongée, ou rendez-vous directement sur le site de DAN.
Cet article s’appuie sur la publication de DAN consacrée à la reprise de la plongée après avoir contracté la Covid-19 ainsi que sur les recommandations faites par l’Undersea and Hyperbaric Medical Society, l’Université de San Diego, et par la Société Belge de Médecine Hyperbare et Subaquatique (à travers le document : Position de la SBMHS sur la reprise de la plongée après une infection à la Covid-19).
Important : nous avons choisi de publier cet article afin de partager les recommandations médicales faites aux plongeurs ayant contracté le virus de la Covid-19 au plus grand nombre d’entre nous. Ceci n’est fait qu’à titre d’information. Les recommandations qui y sont relayées sont valables au moment où nous publions (juin 2021) et sont amenées à évoluer avec le temps. Seul un avis médical doit valoir dans la reprise de votre pratique.
Sommaire
En quoi une infection à la Covid-19 peut-elle compromettre la pratique de la plongée ?
Si certaines personnes touchées par la Covid-19 n’ont aucun symptôme, d’autres ressentent ceux de la grippe, ou peuvent aller jusqu’à développer un syndrome de détresse respiratoire aiguë ou une maladie cardiaque (source: Position de la SBMHS sur la reprise de la plongée après une infection à la Covid-19). En d’autres termes, ce coronavirus peut provoquer des lésions au niveau des poumons ou du coeur.
Les potentielles séquelles à long terme ne sont pas encore toutes connues. Mais l’Université de San Diego relève que les risques de persistance de troubles pulmonaires et/ou cardiaques sont non négligeables.
Les médecins de DAN Europe insistent sur le fait qu’il est essentiel d’avoir récupéré sa condition respiratoire et son niveau physique « d’avant covid » avant d’envisager la reprise de la plongée. Et cela peut prendre des semaines, voire des mois en fonction de la gravité de la maladie. D’après les experts de l’Undersea & Hyperbaric Medical Society, il est impossible de prévoir combien de temps cette convalescence prendra. Cela dépend de trop de facteurs inconnus.
Dans tous les cas, il est indispensable de passer des examens médicaux pour vérifier ses capacités et ses performances cardiaques et/ou respiratoires. DAN Europe recommande que ces tests soient interprétés et validés par un médecin hyperbare. Il pourra en effet interpréter les résultats en prenant en considération les risques spécifiques liés à la pratique de la plongée.
Les recommandations des experts pour reprendre la plongée après avoir eu la Covid-19
DAN Europe précise que ces recommandations peuvent varier légèrement d’un pays européen à un autre, mais que toutes invitent à la prudence dans la reprise de la plongée.
Combien de temps attendre avant de pouvoir remettre la tête sous l’eau ?
Vous avez été testé positif à la Covid-19 et… :
- Vous êtes resté totalement asymptomatique :
- Vous devez attendre au moins 30 jours après le premier test négatif avant de consulter votre médecin pour obtenir votre certificat médical d’aptitude à la plongée ;
- La Société Belge de Médecine Hyperbare et Subaquatique (ou SBMHS) explique qu’il est possible d’être encore contagieux jusqu’à 37 jours après avoir récupéré du virus.
- Vous avez eu des symptômes :
- Une convalescence d’au moins deux mois (30 jours après le premier test négatif + 30 jours sans symptômes) est recommandée avant de consulter un médecin spécialiste de la plongée pour une éventuelle reprise (source : recommandations de DAN Europe).
- Vous avez été hospitalisé.e en raison de symptômes pulmonaires liés à la Covid-19 :
- Trois mois de récupération minimum sont recommandés avant de passer plusieurs examens de la fonction respiratoire. Ces tests (tests des fonctions pulmonaires, test d’effort, entre autres) permettent de vérifier le retour à la normale (sources : recommandations de DAN Europe et de la SBMHS).
- En effet, la SBMHS explique qu’en cas de symptômes pulmonaires graves, les poumons peuvent avoir été abîmés de manière prolongée voire permanente, et ce même s’il nous semble avoir récupéré notre capacité respiratoire « d’avant covid ». Cette détérioration des poumons entraîne un risque plus élevé de barotraumatisme pulmonaire, même dans le cadre d’une plongée effectuée sans remontée rapide ou incontrôlée.
- Vous avez été hospitalisé.e en raison de problèmes cardiaques liés à la Covid-19 :
- Au moins trois mois de repos sont là aussi recommandés. Un bilan cardiaque, un test d’effort et une échographie cardiaque doivent ensuite être effectués pour vérifier les capacités du coeur (source : recommandations de la SBMHS).
- Le coeur peut garder des séquelles après un infection au virus de la Covid-19. Et plonger avec des séquelles cardiaques peut être extrêmement dangereux (risque d’arrêt cardiaque durant la plongée notamment…). Il est donc indispensable de vérifier que les pleines capacités cardiaques ont été récupérées avant d’envisager la reprise de la plongée.
Rester vigilant lors des premières plongées
La plongée est une activité physique : porter son bloc jusqu’au bateau, s’équiper, sortir de l’eau ou devoir gérer un courant un peu trop fort sous l’eau exige un effort physique. Notre respiration s’accélère et nous sollicitons plus nos poumons et notre coeur. Et c’est justement la capacité de ces deux organes que le virus a pu altérer.
C’est pour cette raison qu’il est indispensable d’être très prudent.e lors de la première plongée après une infection à la Covid-19 : les plongées doivent être encore plus progressives en terme de difficulté que d’habitude et le plan de plongée doit être fait de sorte à rester bien en-dessous des limites de décompression.
Il est également nécessaire de rester particulièrement à l’écoute de ses sensations : si l’on sent que l’on s’essouffle beaucoup plus vite que d’habitude, ou si l’on se sent très fatigué même sans faire d’effort, les médecins hyperbares membres du réseau DAN conseillent de consulter rapidement un médecin pour un examen médical approfondi.
L’importance d’un contact avec un médecin hyperbare
La plongée comporte des risques bien spécifiques. Le fait d’évoluer dans un environnement aquatique soumet nos corps à une pression plus importante que sur la terre ferme, ce qui entraîne des changements physiologiques. Et si la plongée est effectuée dans de mauvaises conditions (efforts trop intenses, remontée trop rapide par exemple) ou si les conditions physiques ne sont pas assez bonnes, le danger d’accident existe vraiment.
C’est pourquoi DAN Europe conseille que les examens médicaux qui vont déterminer l’aptitude à la plongée soient validés par un médecin hyperbare, afin qu’ils soient interprétés dans une logique d’aptitude à cette activité bien particulière.
En fonction d’où vous habitez, il peut être difficile de consulter un médecin hyperbare. Sachez qu’en étant assuré.e chez DAN, vous disposez de conseils gratuits et à distance de la part d’un médecin spécialiste de la plongée. Vous pouvez alors lui soumettre vos résultats de tests. Il saura correctement les interpréter et vous indiquer si vous êtes de nouveau apte à la plongée ou pas.
Plonger après avoir eu la Covid-19 : des risques plus élevés d’accident
Les médecins sont unanimes et s’efforcent de le répéter dans leurs recommandations : on en sait encore très peu sur cette nouvelle forme de maladie cardio-pulmonaire et sur ses conséquences sur le corps humain à plus ou moins long terme.
La plupart des experts s’accordent à dire qu’une infection à la Covid-19 expose les plongeurs à un risque plus élevé d’accidents de plongée (sources : recommandations de l’Université de San Diego et de la SBMHS).
Risque de barotraumatisme pulmonaire
La Société Belge de Médecine Hyperbare et Subaquatique indique dans ces recommandations que des problèmes pulmonaires graves survenus à la suite d’une infection à la Covid-19 peuvent entraîner des séquelles pulmonaires prolongées, voire permanentes. Et sans que ces séquelles soient vraiment perceptibles.
Ces potentielles lésions pulmonaires peuvent augmenter le risque d’une surpression pulmonaire dans le cadre d’une plongée tout à fait normale (c’est-à-dire sans remontée rapide ou incontrôlée).
Risque accru d’intoxication à l’oxygène
Les experts ne savent pas encore si les tissus pulmonaires affectés par la Covid-19 deviennent plus sensibles aux effets toxiques de l’oxygène. En tout cas, ils n’en excluent pas la possibilité, ce qui pourrait remettre en cause la plongée au nitrox puisque ce mélange de gaz est enrichi en oxygène.
Ils estiment néanmoins qu’une plongée loisirs au nitrox ne devrait pas représenter de danger car si nous devions être exposés à une pression partielle d’oxygène d’1,4 bar, cela se ferait sur une courte période, lors de la partie la plus profonde de la plongée.
Vous avez l’impression qu’on parle chinois ?! Consultez notre article consacré à la plongée nitrox. On y explique notamment ce qu’est la pression partielle d’oxygène et pourquoi il est important de savoir la calculer 🙂
Risque d’accident de décompression
Le monde scientifique ne sait pas pas non plus si la capacité de « filtration des bulles » de nos poumons peut avoir été affectée après une infection à la Covid-19. Si cela devait être le cas, le risque d’accident de décompression serait significativement plus élevé : les bulles de gaz inerte qui sont normalement « filtrées » par les capillaires des poumons ne le seraient plus et pourraient passer dans la circulation artérielle. Afin de limiter ce risque, la SBMHS préconise que toutes personnes ayant souffert de symptômes pulmonaires dûs à la Covid-19 plongent bien en-dessous des limites de décompression de leur ordinateur de plongée de façon à éviter les paliers de décompression obligatoires.
Le mot de la fin
Ce nouveau coronavirus aura boulversé nos vies jusque dans notre pratique de la plongée…
Au-delà des gestes barrières que nous devons tous respecter, les plongeurs qui ont contracté le virus doivent être extrêmement vigilants avant de se remettre à l’eau : les médecins hyperbares de DAN Europe leur conseillent d’être patients et surtout, d’effectuer les examens médicaux qui s’imposent avant d’envisager de rechausser les palmes.
Les avis scientifiques que nous avons cité tout au long de cet article nous font aussi prendre conscience que même si l’on est déclaré de nouveau apte à plonger, les risques d’accident liés à cette activité sont désormais potentiellement plus élevés. Les plongées devront alors être adaptées en conséquence : immersions moins longues, moins profondes, sans courant…
Gardons en tête que la science avance vite et que les recommandations des experts relayées dans cet article sont amenées à être révisées au fur et à mesure de l’évolution de la pandémie et des découvertes scientifiques.
Enfin, n’oublions pas de continuer à respecter les directives de nos fédérations et de nos centres de plongée : nous pouvons tous contribuer à limiter la propagation de ce satané virus…